Le biais des coûts irrécupérables
Il a fait beau et chaud la fin de semaine dernière! C’est l’été à Montréal, et ça se sent non seulement par les 45 degrés qui nous affligent, mais aussi (heureusement) à l’odeur sublime des grillades sur BBQ du petit voisinage.
Bref, le soleil vous a chauffé la couenne, et vous avez craqué : un arrêt chez le boucher plus tard, vous aviez fait l’acquisition coûteuse d’une magnifique, provocante, juteuse et rougeoyante pièce de filet mignon. Biennn.
Mais les 5@7 imprévus se succèdent tout à coup cette semaine, et entre les soupers chez des amis et les soirées arrosées en terrasse, en ce vendredi midi, votre filet mignon vous fait maintenant la gueule sur la 2e tablette de votre réfrigérateur, à mi-chemin entre le gris, le vert et le brun. Il n’y a aucun doute, il a fini sa vie utile.
Vous êtes donc maintenant devant le dilemme suivant :
- Au prix où vous l’avez payé, mignon ou pas, vous vous convainquez que la seule place possible pour ce filet est au fond de votre estomac creux. Vous achetez quand même un peu de sauce au poivre pour faire passer tout ça, et hop!
- Dommage, mais pas question de se rendre malade – même si ça vous fait mal au cœur après avoir payé si cher, il devra finalement finir ses jours dans votre bac de compostage, et vous devrez vous trouver autre chose pour souper.
Vous pensez sans doute, à ce moment, suivre un raisonnement tout à fait logique et ce, quelle que soit votre décision finale. Vous vous basez bien sur tous les faits disponibles pour prendre une décision tout à fait éclairée, non? En fait, si l’on scrutait attentivement les abîmes de votre cerveau surpuissant, force serait de constater que vous souffrez d’un mal fort répandu : celui du biais des coûts irrécupérables.
Reprenons depuis le début : vous avez payé une fortune pour une pièce de viande alléchante. Aujourd’hui périmée et clairement irrécupérable, vous hésitez quand même à la jeter et pensez qu’en investissant un peu dans une sauce au poivre par exemple, vous pourriez sauver la mise. Mais pourquoi tenir compte du montant payé pour le filet mignon dans votre raisonnement? Ne fait-il pas maintenant parti du passé? Quand on y pense, que vous le mangiez ou non aujourd’hui, votre filet mignon vous aura coûté le même montant, mais dans le scénario A, vous serez malade après avoir réinvesti dans votre steak en l’agrémentant d’une sauce au poivre, alors que dans le scénario B, votre estomac vous dira merci, mais vous aurez à payer pour un nouveau souper.
C’est donc plutôt ça le vrai dilemme : où investir votre argent AUJOURD’HUI afin qu’il vous soit un maximum profitable.
Mais on est tous humains, et on fait tous l’erreur de tenir compte des coûts irrécupérables lors de nos prises de décisions – surtout celles qui sont plus importantes ou qui ont des coûts plus élevés qu’un bon gros steak.
Il nous arrive souvent, à l’agence, de travailler sur des projets « filet mignon » avec des clients (tout aussi mignons) qui sont très attachés à certains éléments déjà développés (que ce soit un site web, une application mobile, un branding, etc.) et ce, malgré le fait qu’ils aient largement démontré aujourd’hui leur inefficacité. Ces outils continuent de pomper leur budget marketing parce que… bien parce que : « Au montant qu’on a mis là-dedans, c’est pas d’main la veille qu’on va changer! » Sounds familiar?
D’après vous, est-ce la bonne façon de voir les choses? Et si, au contraire, continuer dans cette direction ne faisait, finalement, qu’augmenter le coût (déjà élevé) d’un faux pas? Et si la meilleure façon de tirer un certain bénéfice de ces coûts indigestes, ce n’était pas plutôt de tout flusher et de recommencer de nouveau, mais en utilisant simplement les apprentissages du projet précédent pour bâtir quelque chose de mieux?
Un youtubeur que nous aimons beaucoup a réalisé une vidéo très bien faite sur le sujet :
Chez Vio, nous essayons toujours de conseiller nos clients au mieux, bien évidemment. Et face à ce genre de décision, même si le fin mot de l’histoire ne nous appartient souvent pas, nous avons de temps à autre ce genre de conversation avec eux. Nous pensons qu’en tant que conseiller, notre rôle est d’avoir ce genre de conversation plus difficile quand c’est nécessaire. Après tout, Vio signifie « faire route vers ». Et il n’y a rien que nous aimons plus que de guider nos clients dans les dédales et les détours du marketing numérique, dans lesquels nous sommes experts, vers l’atteinte de leurs objectifs.
Mais parfois, bien qu’ils connaissent la destination à atteindre, ils apprécient nos conseils sur la meilleure route à suivre, chemin qu’il est parfois plus pratique d’emprunter en se délestant du poids accumulé de certains « projets filet mignon » pour mieux avancer.
Et croyez en notre expérience, ça se fait beaucoup mieux quand on arrive à mettre de côté… le fameux biais des coûts irrécupérables.