Pourquoi entendons-nous parler davantage de changements climatiques que d’effondrement de la biodiversité?
Parce que les changements climatiques représentent des opportunités de croissance verte tandis que les personnes qui alertent contre l’effondrement de la biodiversité parlent de plus en plus de décroissance comme solution crédible. Et ce mot-là fait peur.
Les changements climatiques, ça se résume pas mal à une question de surplus de GES qui créent un effet cascade. Résumé de façon simpliste comme je viens de le faire, ça donne l’impression que tout ce que nous avons à faire pour régler les changements climatiques, c’est de réduire les GES que nous émettons. On n’a pas besoin de s’attaquer aux causes profondes du dérèglement, juste substituer un type d’énergie qui émet beaucoup de GES (les énergies fossiles) par d’autres plus «propres» (solaire, éolien ou hydroélectrique). Le «problème» climatique est «simple» et «facile» à mesure. Et en plus, le régler crée des nouvelles opportunités de marché pour la croissance verte. C’est génial non?
De l’autre côté, pour la perte de la biodiversité, c’est plus complexe. Ça demande de prendre en compte la diversité des écosystèmes, la diversité des espèces et la diversité génétique en plus de l’interaction entre ces trois piliers-là. On sait qu’il reste encore beaucoup à étudier pour comprendre le phénomène. Heureusement, même si c’est plus complexe, il y a quand même un certain consensus sur les causes majeures de l’érosion de la biodiversité:
- La destruction et la fragmentation des habitats qui forcent les espèces à se déplacer ou qui les font disparaitre.
- La surexploitation des ressources naturelles qui bouleversent l’ensemble de la chaîne alimentaire.
- Les changements climatiques qui modifient directement les milieux de vie par l’augmentation des température et l’acidification des océans. Et contrairement à la croyance populaire, c’est seulement la 3e cause directe de l’effondrement de la biodiversité.
- Les pollutions chimiques, physiques, sonores, lumineuses et électromagnétiques causées par les activités humaines.
- Les espèces exotiques envahissantes, autant causées par le transport et la mondialisation des échanges que par les changements climatiques.
Comment on règle ça?
Il n’y a pas des tonnes de solutions : il faut arrêter de détruire les habitats naturels (en grande partie avec les changements d’usage des sols causés par l’urbanisation et l’industrie) et restaurer des diversités d’habitats, en plus de cesser de surexploiter les ressources naturelles. Il faut surtout prendre conscience qu’on vit dans un monde aux ressources qui ne sont pas infinies. Et que viser une croissance économique infinie, ce n’est pas juste con. C’est complètement irréaliste.
Oui, je sais. Je suis party pooper.
C’est aujourd’hui que débute la COP15 à Montréal. Un des objectifs, c’est de mettre à jour le Plan stratégique pour la diversité biologique 2011-2020 qui comprend une vision partagée, une mission, des buts stratégiques et 20 objectifs ambitieux mais réalisables, nommés « Objectifs d’Aichi ». Aucun de ces objectifs n’a été atteint en 10 ans. C’est pour s’entendre sur le Cadre mondial pour la biodiversité pour l’après 2020 qu’on se réunit à Montréal.
Est-ce que je suis cynique? Non. J’y crois encore. Pour vrai. J’ai encore espoir qu’on parvienne à s’entendre et qu’on prenne action pour renverser les tendances. Parce que je crois en nous et en notre capacité à s’entraider.
Ça prend du courage, de la vision, de la confiance et de l’ambition. Mais ça peut marcher.